À la une, Analyse, Décryptage • 24 juillet 2025 • Ali Camara
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Le recensement de la population doit être appréhendé dans toute sa complexité, en tenant compte des dimensions ethniques, politiques et administratives, afin d’éviter des interprétations simplistes ou conflictogènes.
« Les recensements d’Alpha Condé donnaient toujours de petits chiffres au Fouta et à l’étranger jugés acquis à l’opposition. » Après avoir fait en quelque sorte le parallèle entre l’ère Alpha Condé et le PN-RAVEC (Programme National d’Appui au Recensement Administratif à Vocation d’État Civil), ce commentaire aussi succinct qu’infiniment dangereux ne pouvait que me soustraire du silence dans lequel le deuil et la lassitude du débat public guinéen m’avaient plongé. Bien que je ne sois pas particulièrement acquis au régime défunt, une telle conclusion, si elle correspond peut-être à une réalité statistique, est appuyée par des arguments peu justifiés.
Pratiquement prévisible, les couleurs étant annoncées, les résultats du recensement de la population en Guinée suscitent des débats et des désaccords, en particulier en raison de leur impact sur les dynamiques sociales et politiques du pays. Les interprétations de ces résultats et les enjeux qu’ils peuvent soulever, en matière de représentations ethniques (l’ethnie étant le plus souvent l'ultime capital politique chez nous), de politiques publiques et de gestion des populations donnent lieu à des débats trop souvent acharnés sur les réseaux sociaux.
Depuis quelques jours donc, un tableau statistique du MATD divise l’opinion publique. Au compte du PN-RAVEC, il se présente comme suit :
1. Kankan : 2 089 320 (23,27 %)
2. Conakry: 1 992 986 (22,19 %)
3. Kindia : 1 160 579 (12,92 %)
4. N'zérékoré : 1 094 704 (12,19 %)
5. Boké : 774 090 (8,62 %)
6. Faranah : 681 972 (7,59 %)
7. Labé : 610 636 (6,80 %)
8. Mamou : 436 554 (4,86 %)
9. Extérieur : 139 082 (1,55 %)
Nombre de commentateurs moins désintéressés, qui pour la plupart n’ont jamais lu des résultats définitifs ni d’un recensement général de la population et de l’habitat ni d’un recensement administratif, semblent créer un amalgame dangereux dans leur acception de la région de Kankan. Il n’est donc pas inutile de rappeler qu’il s’agit dans ces résultats de la région administrative, avec toutes les implications que cela sous-entend. De ces implications, nommons ici deux majeures : D’abord, globalement prise, la région administrative de Kankan n’est pas exclusivement peuplée de Malinkés. Ensuite, d’un point de vue administratif, Kankan région n’est pas à confondre à la préfecture de Kankan encore moins à la commune urbaine. Dans ce contexte, il est inexact de penser que la région de Kankan est nécessairement moins peuplée que le gouvernorat spécial de Conakry. Et même là encore, il est important de noter que Conakry ne doit pas être confondu avec la Basse Guinée, laquelle comprend distinctement les régions de Boké et de Kindia.
Les atouts de la région de Kankan : une source de densité et de diversité
Deux questions essentielles pour aider à comprendre plus facilement le contexte de ce recensement :
La région de Kankan aurait-elle reçu davantage de kits de recensement ?
N’zérékoré ne peut pas disposer du même nombre de kits que Yomou. C’est pareil entre New York et Washington. En Guinée comme ailleurs, il est tout simplement impossible que le nombre de kits de recensement soit identique dans des régions ou des villes où il existe une disparité démographique significative. Avant les opérations effectives de recensement, des enquêtes et des sondages sont menés pour établir des prévisions et commander, au passage, ces fameux kits. Ignorer un tel détail est le comble du ridicule ! Même si le nombre initial de kits fournis peut être le même au départ, le processus de recensement entraîne inévitablement une répartition supplémentaire dans certaines régions, préfectures ou villes, en raison de leur différence de population. Par ailleurs, l'administration a démenti les accusations selon lesquelles la région de Kankan aurait bénéficié d'un traitement de faveur particulier.
L’on me répondra sûrement que ceci ne prouve pas cela, c’est-à-dire que les démentis officiels, surtout chez nous, ne sont pas suffisants pour discréditer les accusations. Sauf que, la charge de la preuve reposant sur l’accusateur, il appartient surtout à l’autre camp de suffisamment étayer le bien-fondé de leur cause ou réclamation. Sinon ça restera un dialogue de sourds, un jeu d’accusations et de contre-accusations dans une arène où tout le monde doute de tout ce qui n’est pas de sa chapelle politico-idéologico-régionale. Parfois ethnique. Ceci dit, il est pour ma part important de relever le fait que le contexte politique a certainement poussé la région de Kankan à se mobiliser davantage pour ce recensement, bien plus que d'autres régions. Ce dernier point me semble plus déterminant dans ce recensement.
Kankan est-elle plus peuplée que Conakry ?
Je ne le pense pas. Mais à Conakry, le recensement n’a pas suscité le même engouement qu’à Kankan. Beaucoup n’y ont pas participé, que ce soit par choix, par désintérêt ou encore par protestation politique. À Kankan, c’était tout le contraire. Après avoir fait du recensement une question politique, les acteurs politiques ont naturellement divisé la population en deux camps, en fonction du soutien apporté soit aux autorités de la transition, soit à ce qu’il reste aujourd’hui de l’opposition politique.
Ainsi, alors que certains choisissaient d’accompagner le pouvoir dans ce processus de recensement, d’autres, qu’on le dise ou non, étaient dans une logique de boycott. Sinon, comment expliquer que les deux figures majeures de l’opposition politique, Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, n’aient cherché à se faire recenser qu’à la dernière minute ? Certes, ils n’ont finalement pas été recensés, mais cette attitude s’apparente davantage à une logique de boycott qu’on essaie de rattraper qu’à autre chose. Bien sûr, ce que j’exprime là est une analyse politique – parmi tant d’autres – de leur attitude, et non un désir d’acquiescement ou de justification de ce qui leur est arrivé.
Toujours est-il qu’en tant que leaders politiques et figures d’opinion, il leur appartenait de montrer l’exemple. Tenez : si la date butoir du recensement n’avait pas été reportée, ils n’auraient même pas eu l’occasion de se présenter au centre d’enrôlement. Et si les leaders politiques et d’opinion d’une telle envergure n’étaient pas favorables au recensement, qu’en était-il de leurs militants ?
Par ailleurs, il n’y a pas que ces circonstances sociopolitiques qui ont joué en faveur de Kankan pendant ce dernier recensement. D’un point de vue peuplement, il y a aussi – et surtout d’autres atouts que ne peut ignorer ou disqualifier tout connaisseur ou tout observateur sérieux de la réalité socio-économico-démographique de la Guinée contemporaine. On peut citer, entre autres :
- La présence de zones d’extraction minière, à la fois industrielles et artisanales. À ce niveau, l’affluence des mines d’or par exemple n’est pas à comparer à celle des mines de bauxite. À l’opposé des mines de bauxite, où il faudrait le plus souvent être employé par une compagnie, l’extraction et la vente de l’or peut se faire de manière individuelle et le marché n’est pas moins accessible. Ce qui crée une ruée plus importante et plus constante vers ces zones.
- La présence d’une université publique et de multiple centres de formation professionnelle à Kankan ville ;
- La situation géographique stratégique de la région, partageant des frontières avec le Mali et la Côte d’Ivoire ;
- Une population cosmopolite (similaire à celle de N’zérékoré) résultant de ces différents facteurs susmentionnés.
Aussi, il n’est pas exclu qu’une ville (ou une région administrative, dans notre cas) soit plus peuplée qu’une capitale. C’est ainsi que la ville de Douala est plus grande et plus peuplée que la capitale Yaoundé au Cameroun. New York, Los Angeles, Chicago, Houston, Phoenix, Philadelphie, San Antonio, San Diego, Dallas, et San José sont des villes américaines qui dépassent de loin la capitale Washington en termes de population.
Comparer donc nos régions administratives en termes de population nécessite une approche plus nuancée et factuelle.
Dans le même registre, la préfecture de Siguiri est plus peuplée que celle de Kankan, qui pourtant abrite le chef-lieu de la région administrative. Ce fut, en région dite forestière, le même à une époque où la préfecture de Beyla était plus peuplée que celle de N’zérékoré avec l’afflux des sociétés minières. On peut même supposer que cette dynamique se poursuit aujourd’hui, avec le Transguinéen qui avance et l’exploitation minière qui redémarre à Beyla.
Pour la petite histoire, la ville Mamou est devenue une grande agglomération avec le chemin de fer Kankan-Conakry construit entre 1902 et 1915, qui reliait ainsi la côte atlantique au fleuve Niger et le bitumage de la route nationale N1, qui traverse la Guinée d'ouest en est, reliant Conakry à N’zérékoré, près de la frontière avec le Libéria. Cette route traverse 5 régions administratives sur 9 (y compris la région spéciale de Conakry) et initialement 10 villes dont : Conakry, Coyah, Kindia, Mamou, Dabola, Kouroussa, Kankan, Kérouané, Beyla, N'zérékoré. Pour revenir à l’exemple de Mamou, au-delà de sa position géographique, qui en fait le passage préféré pour toutes les villes situées plus à l'Est afin de rallier Conakry, les échanges commerciaux et la croissance économique, portés par des infrastructures d’envergure (comme le chemin de fer et la route nationale la plus pratiquée) ont permis à la ville de se positionner, à une époque, comme une véritable « ville-carrefour ».
La confusion entre recensement administratif et répartition ethnique
La démographie est une science dynamique. Même sur une courte période, la configuration d’une population peut évoluer pour plusieurs raisons, notamment les migrations ou les mutations économiques. Ces facteurs doivent être pris en compte pour tout débat démographique sérieux.
Dans ce cas de figure, selon les chiffres cités ci-haut, le PN-RAVEC semble bien différencier les réalités administratives des réalités ethniques. De sorte qu’il ne faudrait surtout pas confondre le recensement de la population par région administrative avec la répartition nationale selon les subdivisions ethniques. Cette distinction est cruciale, car :
- Les Peuls constituent très probablement le groupe ethnolinguistique majoritaire en Guinée. Bien qu’ils soient davantage concentrés dans la région administrative de Labé, ils sont également présents en nombre significatif dans presque toutes les préfectures du pays.
- Ces nuances doivent être prises en compte afin d’éviter toute interprétation erronée ou toute généralisation abusive des statistiques.
Ainsi donc, comparer les régions administratives ou tirer des conclusions sur la base de suppositions générales relève d’un manque de rigueur dans le débat public. Par exemple, affirmer que « Kankan est peuplée uniquement de Malinkés » est aussi erroné que prétendre que « Conakry est exclusivement peuplée de Soussous » ou que « Labé est entièrement peuplée de Peuls ». De telles généralisations biaisent le débat et alimentent des tensions inutiles qui risquent d’exacerber les tensions ethniques dans un contexte où la cohésion nationale doit être plus que préservée.
Les recensements en Guinée et les enjeux politiques
L’assertion selon laquelle les recensements effectués sous Alpha Condé seraient biaisés en défaveur des régions jugées acquises à l’opposition, comme le Fouta ou les populations à l’étranger, mérite une réflexion approfondie. Si cette idée peut découler d’observations empiriques, les raisons avancées restent somme toute discutables à plusieurs égards :
- Aucun élément statique ne prouve que les chiffres présentés dans le recensement soient falsifiés ou manipulés à des fins politiques.
- L’interprétation hâtive des données statistiques peut entraîner des accusations infondées et renforcer les divisions.
Ainsi, plutôt que de privilégier les hypothèses, il est préférable d’encourager une analyse rigoureuse et transparente. Les manœuvres politiques, si elles existent, doivent être soigneusement étudiées et clairement démontrées avant d’être dénoncées.
Ce que nous devons suffisamment interroger, c’est le choix des agents de recensement, ou les conditions logistiques dans des zones éloignées. Nous avons besoin d’interroger les mesures prises pour enrôler les communautés très souvent marginalisées (populations rurales éloignées, minorités isolées, groupes en situation précaire, etc.). Et, dans un monde aussi connecté, pourquoi n’a -t-on pas exploré, au-delà de l’enregistrement physique, des solutions technologiques (comme l’enrôlement numérique) ?
En ce qui concerne le cœur de la ville de N’Zérékoré, je suis un témoin oculaire de la baisse significative qu’a connue sa population au cours de la dernière décennie. Ce constat peut être élargi à toute la préfecture, voire à l’ensemble de la région administrative, où les sous-préfectures se retrouvent presque désertées par leur jeunesse. C'est tout le contraire de la région de Kankan, où les sous-préfectures sont les plus peuplées à cause de l’extraction de l’or, notamment l’extraction artisanale.
La dernière fois que j’étais à Sinko, une des plus grandes sous-préfectures en région forestière, j’ai également fait le même constat concernant la préfecture de Beyla et ses environs. Peut-être que la reprise de l’exploitation minière et les perspectives qu’elle présente pourront inciter une partie importante de ces jeunes à revenir.
Et pour ce qui est du recensement à l’étranger, notamment aux États-Unis, où je réside depuis quelques années, il y a plusieurs raisons qui expliquent la faible participation des Guinéens. D’abord, beaucoup ont appris tardivement que le recensement avait lieu. De plus, certains Guinéens, notamment ceux en situation irrégulière, qui ont entrepris une démarche d’asile ou de changement de citoyenneté, n’ont pas souhaité participer. Je peux affirmer avec certitude que la plupart de ceux qui ont récemment immigré aux USA par le Nicaragua ou le Brésil ne se sont pas du tout fait recenser.
Le paradoxe démographique en Guinée : entre recensements et réalités incomprises
Le premier véritable Recensement Général de la Population et de l'Habitation (RGPH) en Guinée a eu lieu en 1983. Ce recensement a révélé une population d’environ 4,66 millions d'habitants (y compris les étrangers), dont 1,21 millions en milieu urbain, soit 26%, avec un taux de croissance annuel estimé à 3 %. Dans le rapport final publié par le Ministère du plan et de la coopération internationale d’alors, on peut lire ceci : « En revanche, plusieurs recensements administratifs ont eu lieu, dont les plus connus sont ceux de 1962, de 1972 et de 1977. Les seules informations issues de ces recensements administratifs furent les effectifs de population par subdivisions administratives et par sexe. Les fiches de recensement permettaient mieux, mais le dépouillement mécanographique n'a pas été possible. Le dénombrement administratif de 1972 est le seul qui propose une répartition par âge et sexe de la population ».
Lors du recensement de 1996, la population enregistrée était d’environ 7,156,406 habitants. Bien que les résultats de ce recensement aient mis un accent particulier sur l’exode rural, en raison d’une forte croissance démographique dans les centres urbains, notamment à Conakry, ils n’ont jamais permis d’expliquer de manière formelle les raisons de la baisse de la population générale d’au moins 1 million de personnes par rapport aux prévisions.
En 2014, le recensement a révélé une population d’environ 10,523, 261 habitants, avec un taux de croissance démographique d’environ 3,1 % par an, l’un des plus élevés d’Afrique de l’Ouest. Quelques constats importants se dégagent de ce recensement :
- Population urbaine : 35 %.
- Population rurale : 65 %.
- Une forte concentration dans la capitale, Conakry, avec environ 1,7 million d’habitants.
- Des disparités importantes entre les régions, avec une densité démographique plus élevée dans les zones côtières, notamment en Basse Guinée.
Ces résultats soulignent une dynamique démographique marquée par une concentration urbaine croissante, mais ils continuent de soulever des interrogations sur la croissance paradoxalement faible de la population totale malgré un taux annuel rapporté comme étant élevé.
Aujourd’hui, au-delà du renversement des dynamiques démographiques, notamment en faveur de la région administrative de Kankan, une faible participation de la diaspora, rien n’explique la baisse de notre population générale telle qu’annoncée par les nombreuses prévisions émanant tant de nos institutions nationales que des organismes internationaux plus ou moins indépendants.
Dans un tel contexte, plusieurs facteurs suscitent des interrogations :
- Les populations ne se sont-elles pas suffisamment recensées ? Et pourquoi ?
- Les prévisions établies, que ce soit par des organismes nationaux ou internationaux, sont-elles inexactes ?
- Ou bien sommes-nous confrontés à un véritable mouvement démographique significatif, marqué par des changements récurrents dans la taille et la composition de notre population ? Ces changements seraient principalement dus aux naissances, aux décès, et surtout aux migrations causées par divers facteurs.
La nécessité d’une approche proactive
En vérité, le recensement ne tient compte que de ceux qui se recensent. À l’école, au marché ou dans l’administration, c’est le même principe. C’est pourquoi il est impératif que les partis politiques et la société civile s’impliquent activement dans le processus de recensement dès la phase de collecte. D’une part, cela garantirait une transparence accrue et limiterait les soupçons de manipulation. Et d’autre part, une participation proactive aux processus politiques permettrait d’en influencer plus efficacement les résultats, plutôt que d’en subir les décisions une fois les données publiées. Les acteurs politiques doivent donc s’intéresser davantage aux processus politiques, peu importe leurs divergences ou conflits avec le pouvoir en place. Une telle démarche, à la fois lucide et pragmatique permettrait d’éviter de pointer les autres du doigt.
Malheureusement, l’intérêt pour la gestion et la structuration de la population semble limité aux périodes électorales. Ce qui, soit dit en passant, réduit systématiquement la discussion démographique à un simple objet de polémique. Promis pour être un acte de refondation et de planification, le PN-RAVEC, du fait du fichier électoral qui doit en être extrait, et par l’entremise de « paraphrases politiques déterminées par des intérêts partisans », est perçu par la plupart des Guinéens comme un simple instrument politique.
D’autant plus qu’il intervient dans un contexte politique plus complexe où la méfiance entre les acteurs politiques s’est davantage accrue. Ce qui explique forcément des résultats qui nous interpellent tous. Sur une estimation de la population guinéenne annoncée à 14,4 millions en 2025 selon Trading Economics avec une croissance démographique d’environ 3%. Selon Perspective Monde, il n’y a que près de 9 millions de guinéens qui ont pu se recenser. Très exactement 8 979 923 de personnes recensées, selon la Coordination PN-RAVEC. Même pas 10 millions de nationaux ?!
Peut-on en déduire aujourd’hui que, conçu pour recenser les citoyens guinéens en vue de constituer un registre national (actes de naissance, cartes d’identité biométriques, base pour le processus électoral), le PN-RAVEC contribue à davantage diviser en raison d’un contexte sociopolitique qui serait insuffisamment inclusif ou d’une politisation excessive qui aurait probablement influencé tout le processus ? L’avenir nous le dira.
Mais, d’ici là, je ne réfute pas nécessairement l’éventualité de stratégies politiques (chose que je ne cautionne pas) liées à un recensement spécifique de la population, comme beaucoup de mes contradicteurs pourraient hélas l’insinuer. Il me semble d’ailleurs que cela est une réalité en Guinée comme ailleurs. Les manœuvres de ce type peuvent être nombreuses, mais, encore une fois, elles devraient être identifiées, rigoureusement analysées, clairement nommées et démontrées avant d’être dénoncées de manière hâtive sur la base de simples hypothèses.
Nous devons privilégier un débat public constructif par lequel les généralisations à tout-va et les suppositions gratuites laisseront place à une analyse rigoureuse fondée sur les faits. Le recensement de la population doit être appréhendé dans toute sa complexité, en tenant compte des dimensions ethniques, politiques et administratives, afin d’éviter des interprétations simplistes ou conflictogènes.
Et, en terminant ces lignes, je formule le vœu que notre débat politique – s’il advient véritablement – puisse enfin prendre le dessus sur les cloisonnements ethniques. Que nos acteurs puissent enfin s’enrichir de mots tels que culture, éducation, planification ou encore économie, au lieu de toujours ramener les discussions aux questions ethniques – aux Peuls, aux Malinkés, aux Soussous, aux Forestiers, etc. Il est temps de parler de ce qui nous unit, de ce qui peut nous rassembler. Et si on doit parler de nos problèmes persistants, de nos défis intergénérationnels, tâchons de le faire avec rigueur, objectivité et lucidité.
Ali est diplômé en Droit des Affaires de L’Université Général Lansana Conté de Sonfonia (UGLC-S ). I...
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