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Le mal-être camerounais est celui de la gestion politique

Afrique, Décryptage, International, Politique • 31 août 2025 • Christian ADEBA EDOGUE

⏳ 6 min de lecture

Le mal-être camerounais est celui de la gestion politique

La posture d’Achille Mbembe peut être lue comme une provocation salutaire, destinée à désenclaver le débat public et à déconstruire les narratifs officiels.

Dans une intervention en date du 27 août 2025 dans l’émission le Grand invité Afrique sur radio France internationale (RFI), le philosophe et historien Achille Mbembe invite à  adopter un regard décomplexé sur les dynamiques qui traversent et travaillent l’espace  public camerounais depuis que la candidature de Maurice Kamto à été recalée au palier des  investitures de l’élection présidentielle du 12 octobre prochain. Il évoque l’existence d'une  « fixation identitaire persistante » à l’encontre des compatriotes Grassfields, dont le  principal terroir est la région de l’Ouest du Cameroun, laquelle région abrite également  quatre autres communautés que sont les Bamoun, les Mbo, les Kirdi et les Tikar. Une fixation  qu’il qualifie de « technologie de pouvoir », instrumentalisée pour « neutraliser certaines  figures politiques ». D’après l’auteur, le candidat Maurice Kamto aurait été « neutralisé » en raison de son appartenance communautaire.  

Lorsqu'un intellectuel aussi éclectique et rigoureux qu’Achille Mbembe se prononce sur un  sujet aussi sensible que complexe, il convient d’aborder ses propos avec prudence,  honnêteté et humilité intellectuelle. Sa grille de lecture, bien que percutante, appelle à une  mise à distance critique, surtout lorsque l’on comprend la logique de son raisonnement sans  nécessairement y adhérer pleinement.  
Il ne s’agit pas ici de contester la réalité des ressentis communautaires, ni de nier les  mécanismes de stigmatisation ethnique qui peuvent traverser le champ politique  camerounais – d’autant plus que les représentations stéréotypées sont plurielles et non  exclusives, et qu’elles traversent les sociétés multiculturelles, indépendamment des  contextes nationaux. Mais il est essentiel de ne pas réduire les luttes politiques à une seule variable identitaire. 

Le mal-être camerounais est multidimensionnel : il relève d’une crise de  légitimité, d’une captation oligarchique du pouvoir, et d’une érosion du contrat social.  

En ce sens, la posture d’Achille Mbembe peut être lue comme une provocation salutaire,  destinée à désenclaver le débat public et à déconstruire les narratifs officiels. Mais elle doit  aussi être interrogée dans sa capacité à recomposer les imaginaires politiques, sans tomber  dans une essentialisation des clivages et des stéréotypes communautaires.  

Le cœur du mal-être camerounais semble résider dans une gouvernance fragilisée, marquée  par une concentration excessive du pouvoir et une gestion peu équitable des ressources  publiques. Cette configuration favorise des dynamiques de repli et de conservation, où  certaines élites politiques manifestent une crainte profonde de perdre les acquis obtenus  dans un système fondé sur la rente et le contrôle. Ce climat contribue à une forme  d’immobilisme institutionnel, qui freine les perspectives de réforme et d’ouverture. 

Dans ce contexte, les fixations identitaires — qu’elles soient liées à la question anglophone, à  celle des Grassfields, ou aux revendications autochtones, fonctionnent comme des  dispositifs de diversion. Elles constituent un écran de fumée, destiné à désarticuler la critique  systémique du mal-être camerounais, en la fragmentant sur des lignes de fracture  communautaires. La fixation identitaire est un artifice spécieux qui n'est pas unique.  

La question foncière, notamment dans les métropoles comme Yaoundé et Douala, ainsi que  les luttes pour la réappropriation territoriale par les enfants du Moungo, ne sont pas des  phénomènes isolés. Elles relèvent d’une défaillance structurelle de la politique foncière, et témoignent d’une fragilité structurelle dans la gouvernance foncière, où l’articulation entre  les cadres administratifs, les pratiques institutionnelles et les enjeux sociaux demeure  problématique. Elles traduisent une crise de l’État territorial, dans laquelle les droits d’usage  et d’appartenance sont parfois mobilisés à des fins de gestion clientéliste, au détriment de  l’équité et de la transparence. 

Il ne s’agit pas de nier les ressentis légitimes des populations, mais d’éviter de faire des  stéréotypes ethniques un marqueur d’un « tribalisme institutionnel », en sacrifiant l’analyse  du mal-être camerounais sur l’autel des passions identitaires. Le ressentiment, en tant  qu’affect politique, peut être mobilisé pour renforcer la polarisation, mais il ne saurait tenir  lieu de grille de lecture suffisante pour penser la transformation.  

Les connexions et les interconnexions entre l’identité et le politique — en tant que luttes pour le pouvoir — sont bien connues des sociétés plurielles. Au Cameroun, le rôle de l’identité dans la conquête et l’exercice du pouvoir semble avoir franchi un cap supplémentaire lors de l’élection présidentielle d’octobre 2018, avec la polarisation du discours communautaire dans l’espace public. La médiatisation de l’identité en cette nouvelle échéance électorale ne saurait être un fait anodin : elle peut s’analyser comme une stratégie collusive et volontaire de certaines élites politiques visant à détourner l’attention du mal-être camerounais, lequel relève avant tout de la gestion politique.

Le recalage du candidat Maurice Kamto au palier de l’investiture par l’institution compétente obéit à la forme prescrite par la législation électorale camerounaise, pour faire référence au commentaire publié par ce dernier dans les colonnes du journal Mutations, le 26 octobre  2004, à la suite de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle du 11 octobre  2004 par la Cour Suprême du Cameroun, qui agissait alors comme Conseil Constitutionnel.  Pourrait-on en faire aujourd’hui une critique rhétorique pour souligner la contradiction en  précisant que : le Conseil Constitutionnel a arrêté et proclamé la liste des candidats à l'élection présidentielle du 12 Octobre 2025. On en connaît les candidats retenus et ceux  recalés, exit donc des polémiques sur l’appartenance communautaire d’un des candidats recalés. 

Sur les quelque quatre-vingt candidatures enregistrées par Elections Cameroon (ELECAM) en vue de l’élection présidentielle d’octobre 2025, seules douze ont été définitivement validées à l’issu du contentieux pré-électoral. Tant parmi les candidatures retenues que celles écartées figurent des personnalités issues de la communauté Grass Fields, à laquelle appartient également le candidat Maurice Kamto. Dès lors, l’hypothèse d’une « fixation identitaire » ciblant exclusivement cette communauté ne saurait constituer une grille d’analyse exhaustive pour expliquer le rejet de sa candidature.

Il convient, pour mémoire, de revenir sur les paroles d’un juriste de renom qui disait : « pour ceux qui sont attachés à la légalité républicaine, les décisions de cette auguste juridiction sont comme des dogmes. Non pas qu’on y puisse déceler parfois quelques scories ; mais notre système juridique pose pour principe immuable, qu’en disant le droit, la haute juridiction, tel le Pape, est habitée par la grâce d’infaillibilité. C’est pourquoi, elle parle ne varietur, une fois pour toutes et ce qu’elle arrête et proclame est sans recours ».

L’intervention de l’historien et philosophe Achille Mbembe offre une lecture  stimulante des tensions qui traversent l’espace public camerounais : le rôle de l’identité dans  la conquête et la conservation du pouvoir. Tout en reconnaissant les ressentis  communautaires, réduire le recalage du candidat Maurice Kamto par le conseil  constitutionnel à l’élection du 12 octobre prochain à son appartenance ethnique ne résiste  pas à l’épreuve des faits, et peut accentuer le ressentiment qui est instrumentalisé dans les  discours populistes. Si les ressentis communautaires doivent être reconnus, il importe de ne  pas en faire le prisme exclusif d’analyse. La transformation politique du Cameroun exige une  approche lucide et systémique, capable de dépasser les clivages et de réinterroger les  fondements institutionnels du vivre-ensemble. 
 

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Christian ADEBA EDOGUE est un professionnel des politiques publiques et du management des organisati...

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